Présentation de l’éditeur : Un paisible village niché au cœur de la forêt anglaise, non loin d’un mur mystérieux, infranchissable. Mais pas pour Tristan, qui a juré de rapporter à la belle Victoria une étoile filante tombée de l’autre côté… Il y découvre un monde fantaisiste merveilleux où fées, sorcières, licornes et princes sanguinaires se disputent le pouvoir à coups de sortilèges et d’enchantements. Mais gèrent aussi tous les soucis du quotidien en pays magique…
Traduit de l’anglais par Frédérique Le Boucher.
Éditions Au Diable Vauvert – 336 pages
Depuis 2001 en libraire.
Ma note : 4 / 5
Broché : 17 euros
Poche : 5,80 euros
Ce que l’on pourrait appeler la saisonnalité de certains registres de la littérature de genre est un concept étonnant. Le cliché le plus récurrent étant de dire d’un titre de chick lit ou d’un roman de gare qu’ils sont des lectures idéales pour les vacances, particulièrement d’été comme si les neurones fondaient comme neige au soleil. Le répit professionnel est-il forcément estival et implique-t-il fatalement une relâche intellectuelle ne prédisposant qu’à des lectures légères ? Pourquoi pas. Mais l’on pourrait tout aussi légitimement avancer que justement, c’est parce que l’on n’est pas en vacances et donc débordé de préoccupations liées au travail ou autres contingences quotidiennes que l’on éprouve le besoin de décompresser avec des lectures futiles et divertissantes. Et que c’est pendant les vacances que l’esprit est le plus disponible pour des textes plus exigeants. Bref, la saisonnalité en terme de littérature est finalement très relative ; la vraie liberté du lecteur étant de lire ce qu’il veut, comme il veut et quand il veut. Cela étant, la période des fêtes de fin d’année, terrain dès la plus tendre enfance d’un univers imaginaire foisonnant, est propice aux délices régressifs en tout genre, passant entre autres par la lecture. Accordons-nous donc à dire en dépit de la précédente démonstration que Stardust de Neil Gaiman se prête parfaitement à la saison.
Ce grand classique de la littérature de l’imaginaire qui a sa propre page Wikipedia n’est pas récent puisqu’il a paru en 1999 pour la première fois au Royaume-Uni, a été traduit et édité en France en 2001 et a ensuite fait l’objet en 2007 d’une adaptation cinématographique réalisée par Matthew Vaughn, avec entre autres acteurs, Michele Pfeiffer, Robert De Niro, Sienna Miller, Claire Danes et Charlie Cox.
Auteur polymorphe croulant sous les récompenses littéraires (Prix du scénario d’Angoulême, Prix Eisner, Prix Bram Stoker, Prix humanitaire Bob Clampett, Prix Harvey, Prix World Fantasy…), cet Anglais installé aux États-Unis touche à de nombreux registres : comics, bande dessinée, roman graphique, roman, nouvelle, album pour enfants, scénario pour feuilletons radiophoniques, séries télévisées ou cinéma (dont le sublime film d’animation Coraline), il s’est même essayé à la biographie (secret honteux consacré aux Duran Duran qu’il aurait souhaité ne jamais écrire).
Mais c’est bien dans le domaine de la fantasy que ce père de plusieurs best-sellers s’illustre. Si les adeptes du genre habitués aux grandes épopées doivent trouver Stardust : le mystère de l’étoile un peu léger – même si pour certains, il doit bien garder la saveur de la madeleine de Proust leur ayant mis le pied à l’étrier -, les lecteurs occasionnels se régaleront de ce roman court, archétype du conte merveilleux tenant davantage de l’heroic fantasy que du conte de fées pour petites filles du fait d’une certaine noirceur et d’une cruauté palpable jalonnant le récit – encore que l’analyse des œuvres des frères Grimm dont on berce les têtes blondes révèle leur caractère carrément trash !
Du « Il était une fois… » au pays magique empli de personnages et autres créatures fantastiques (princesse, sorcière, gobelin, fée, licorne, et cætera), en passant par la phraséologie parfois toute troubadourienne et les thèmes abordés… tout y est ! Sauf le « ils vécurent heureux et eurent beaucoup d’enfants », n’en déplaise à Bettelheim, Gaiman préférant y substituer à raison et talent une fin originale très personnelle. Et d’être émerveillé à la lecture de ce roman d’initiation, d’amour, d’aventure et de quête merveilleuse nécessitant de surmonter moult dangers…
Jusqu’alors uniquement disponible en poche chez J’ai lu, Stardust existe désormais en grand format estampillé young adult depuis octobre 2015 Au Diable Vauvert. Dite illustrée par Kellan Peck, cette nouvelle édition ne présente en fait qu’un seul dessin répété à chaque séparation de chapitre, contrairement à l’édition originale magnifiquement ornementée par Charles Vess. Il est certain qu’une telle différence de traitement a une incidence directe sur le coup d’un ouvrage mais quel plaisir s’eût été de pouvoir contempler d’artistiques représentations d’un univers si riche ! L’on peut arguer la liberté d’imagination de chaque lecteur ; malgré tout, c’est un des regrets que l’on peut opposer à cette nouvelle publication. Le second étant l’absence de notes de la traductrice : issu de la littérature anglo-saxone et profondément influencé par la culture et le folklore anglais, il est dommage que le lecteur français ne puisse saisir toutes les subtilités du récit dont les références vont de Shakespeare, Bunyan, Sterne, Dickens à bien d’autres encore connues des seuls habitants de la perfide Albion. Sans compter les jeux de mots et autres subtilités de langage dont Neil Gaiman est semble-t-il un adepte.
Quoi qu’il en soit, Stardust reste un interlude féérique prenant et divertissant qui, entre magie et poésie, se prête merveilleusement à l’atmosphère de Noël.
Vous aimerez sûrement :
Zora, un conte cruel de Philippe Arseneault, L’enfant des étoiles de Dominique Chalumeau, Ferrailleurs de la mer de Paolo Bacigalupi, Rainbow warriors d’Ayerdhal, Julian de Robert Charles Wilson, Hunger Games de Suzanne Collins, Enfants de la paranoïa de Trevor Shane, Peste de Chuck Palahniuk, Enig marcheur de Russel Hoban…
Extraits :
L’écureuil n’a pas encore trouvé le gland qui deviendra le chêne don on fera le berceau dans lequel grandira celui qui me terrassera.
…
Il n’y a pas de catin à Scaithe-le-Jusant, ou aucune, du moins, qui se considère comme telle, même s’il n’a jamais manqué de femmes qui, poussées dans leurs retranchements, concéderont une tendance certaine à la polyandrie avec un mari sur tel navire – qui fait escale tous les six mois – et un autre sur tel navire – en relâche au port pour un mois environ, tous les neufs mois.
Ces petits calculs se sont toujours faits à l’entière satisfaction de toutes les parties concernées et, quand, par hasard, ils ne tombent pas juste et qu’un homme revient voir sa femme quand un autre de ses « maris » est encore dans la place, eh bien, il y a une bagarre – et les rhumeries pour consoler le perdant. Les marins y trouvent leur compte : ils savent qu’avec un tel arrangement, il y aura au moins quelqu’un qui s’apercevra de leur absence, le jour où ils ne rentreront pas à terre, et qui les pleurera. De leur côté, les femmes se confortent en se disant que, de toute façon, leurs époux leur sont forcément infidèles, puisqu’on ne peut rivaliser avec la mer dans le cœur des hommes, la mer qui est à la fois leur mère et leur maîtresse et qui lavera aussi leur corps quand leur heure dernière aura sonné, le lavera inlassablement jusqu’à ce que, corail, ivoire et perles de nacre, ils reposent à jamais dans ses profondeurs abyssales.
Un grand merci aux Éditions Au Diable Vauvert et à Babelio pour m’avoir offert l’opportunité de découvrir ce livre.
Voici un auteur de sf que je n’ai toujours pas lu ! Mais il me semble que j’ai vu le film tiré du livre et j’en garde un bon souvenir.
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J’ai du pour ma part en voir une adaptation télévisée parce que je n’ai pas vu le film, c’est certain, pourtant une sensation de déjà vu m’a accompagnée durant tout ma lecture. Mais impossible de resituer cette résurgence paramnésique… Malgré ces réminiscences, le plaisir de lecture était au rendez-vous, c’est bien l’essentiel !
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Oui tu as raison, je n’arrive pas à me concentrer si je vois les images du film pendant ma lecture. C’est même rébarbatif.
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C’est mon principe aussi, jamais le livre après le film. Et rarement le film après le livre.
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Si j’ai bien aimé le livre ça ne me dérange pas de voir le film, voir ce qu’ils en ont fait.
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Ça assez variable pour moi. Mais je n’ai vraiment pas la culture de l’image autre que sortie de ma tête. Je suis pourtant enchantée quand je vois un bon film mais il est rare que je décide d’en regarder un. Mon réflexe est toujours d’ouvrir un livre, on se r’fait pas !
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J’aime bien les deux .. surtout depuis que je dois porter des lunettes pour lire.
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Bravo pour ton premier paragraphe sur les lectures de vacances…
Je plussois, je sursois, j’hypersois… ^^
Quant à Stardust, je n’ai pas lu mais je peux conseiller à tout fan de ce style de littérature le magnifique Neverwhere, du meme joyeux monsieur…
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Ah, ça me rassure de ne pas être là seule à penser à contre-courant de ce qui semble être l’opinion commune (encore que c’est de coller au panurgisme qui habituellement entraîne chez moi un besoin de rassurance – pour citer une fois encore Oscar Wilde « Quand les gens sont de mon avis, il me semble que je dois avoir tort »).
Merci pour ta recommandation, c’est noté. J’irai cliquer (pfiou… hi hi hi) sur Babelio pour voir si tu en as parlé. Ma PAL te dit merc… *badaboum*
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+1 aussi pour la citation de Wilde…
Quant à mon ressenti sur Neverwhere, ne cherche pas sur Babelio, je ne suis pas très productif, comme tu peux le voir si tu cherches mes critiques ^^
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Merci de m’avoir épargné quelques clics (hi hi allez, promis, c’était ma dernière blague sur le sujet sinon tu vas croire que de contre-rancunière, je suis carrément vacharde). Je te crois donc sur parole pour Neverwhere et ne manquerai pas de te faire part de mon ressenti quand j’aurai l’occasion de le lire.
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L’economie de clics ,c’est cadeau. Par contre, Rien ne t’empêche d’aller lire ma superbe critique de orgueils et préjugés.. ^^
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Superbe, effectivement ! J’adore le style :) J’en ai profité pour en lire d’autres et promis, je laisse bientôt des com’.
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